Plusieurs médecins soulignent que le vaccin ne sera que “l’une des solutions” pour vaincre le Covid-19.
Les laboratoires Pfizer et BioNTech ont annoncé avoir développé un vaccin efficace à 90% contre le Covid-19. Une information largement vue comme porteuse d’espoir dans la lutte contre l’épidémie de coronavirus. Pourtant, la mise au point d’un vaccin, celui de Pfizer ou d’un autre, pourrait ne pas suffire à vaincre le Covid-19.
D’autant que ce vaccin de Pfizer, s’il était commercialisé, poserait d’importantes contraintes logistiques. Il est basé sur une technologie totalement nouvelle, celle dite de l'ARN messager, qui impose de le conserver à environ -80 degrés, quand un vaccin classique peut se conserver à -20 degrés.
Un problème de transport et de conservation
Au-delà du transport du vaccin dans ces conditions, son stockage à -80 degrés est un autre problème logistique de taille pour les hôpitaux et pharmacies. Le laboratoire américain aurait déjà pensé à une partie de la solution ; des conteneurs de la taille d’une valise, qui permettrait de transporter 5 000 doses. Mais ces ces boîtes ne pourront être ouvertes que deux fois pour ne pas briser la chaîne du froid et ne pourront conserver les vaccins que dix jours au maximum.
Plus globalement, quel que soit le vaccin qui sera commercialisé, c’est le principe même qui est remis en cause. Premier à mettre en garde, le directeur Europe de l’Organisation Mondiale de la Santé, Hans Kluge. Le 14 septembre, il prévenait : “J'entends tout le temps : ‘le vaccin va être la fin de l'épidémie’. Bien sûr que non ! Nous ne savons même pas si le vaccin va être efficace dans toutes les parties de la population. Certains signes que nous recevons est qu’il sera efficace pour certains, mais pas pour d’autres”.
Des propos qui trouvent un écho de plus en plus large chez les médecins. “Le vaccin, je ne sais pas quand il va arriver, je ne sais pas s’il sera efficace, donc il faut qu’on se dise que le vaccin est l’une des solutions mais qu’on ne sait pas s’il sera la solution”, prévenait sur RTL le professeur Gilbert Deray, chef du service de néphrologie de l'hôpital de la Pitié-Salpétrière à Paris.
“Un vaccin qui n’est peut-être pas parfait”
De son côté, Christian Drosten, célèbre virologue allemand, estime qu’il faut préparer l’opinion à un vaccin “pas parfait”. “Il se peut que les vaccins n’offrent pas une protection suffisante ou qu’il y ait des effets secondaires qui empêchent de les recommander aux jeunes, qui ont tendance à ne pas tomber gravement malades. Je pense qu’il faut commencer à préparer dès maintenant la population à un vaccin qui n’est peut-être pas parfait”, prévenait Christian Drosten dans une interview accordée à Zeit début octobre.
Le vaccin développé par Pfizer est basé sur la technique de l’ARN Messager, qui n’a jusqu’à présent jamais été testée sur l’Homme, et dont les possibles effets secondaires seront donc à surveiller avant d’envisager sa large diffusion, préviennent plusieurs médecins.
Dans La Croix, la professeure Elisabeth Bouvet, qui participe à l'élaboration d'une stratégie de vaccination contre le Covid-19 au sein de la Haute Autorité de santé, tempère également l’enthousiasme de certains. “Le vaccin ne sera pas la solution à tout”, lance-t-elle.
Maintenir les restrictions malgré le vaccin
Si certains de ses confrères émettent des craintes sur l’efficacité du vaccin sur l’ensemble de la population, cette spécialiste des maladies infectieuses et tropicales a une autre inquiétude. “Les premières doses risquant d'être limitées, la France, comme la plupart des pays, compte cibler en priorité les soignants, les personnes âgées et les personnes à risques, comme les diabétiques”, explique-t-elle dans La Croix, alors que la quasi-totalité des pays lorgnent sur le vaccin.
Durant cette période, où seule une partie de la population pourra être vaccinée, il faudra “maintenir les restrictions d’hygiène et de contacts”, appuie Christian Drosten. Autrement dit, le masque, le gel hydroalcoolique et les limitations des contacts sont là pour un moment.
Les États-Unis ont déjà commandé 100 millions de doses, et prévoient d'en acheter jusqu'à 500 millions. L'Union européenne prévoit d'en acheter 200 millions et pourrait en réclamer 300 millions de plus. Les deux laboratoires qui développent ce vaccin prévoient d’en livrer 100 millions de doses d'ici à la fin de l'année et jusqu'à 1.3 milliard en 2021. Si la commercialisation se confirme, le défi logistique s’annonce colossal.
Combien de temps le vaccin sera efficace ?
Mais le fait que toute la population ne soit pas vaccinée aura tout de même un effet positif sur la lutte contre le virus. Si ce dernier ne disparaîtra pas, sa circulation et ses formes graves devraient nettement réduire. Le Covid-19 “fera beaucoup moins de dégâts quand l'action coordonnée de l'immunité acquise par la population après l'infection et celle acquise grâce à la vaccination limiteront sa circulation et son pouvoir pathogène”, conclut Elisabeth Bouvet.
Mais ce ne sont pas les seules interrogations. Le docteur Yvon Le Flohic souligne également l’inconnue qui règne autour de la durée des anticorps. “Sur la question de la durée de l’immunité contre le coronavirus, on ne sait rien. Quelques jours ? Quelques semaines ? Quelques mois ? Cela veut dire qu’un vaccin pourrait n’être efficace que durant une certaine période” nous rappelle le médecin généraliste, ce qui pourrait nécessiter donc une nouvelle vaccination avec une certaine récurrence.
“Il faut que l’immunité dure au moins un an, pour peut être faire des rappels tous les ans comme pour la grippe”, explique sur BFMTV Frédéric Adnet, chef des urgences de l’hôpital Avicennes à Bobigny. Certains cas de recontaminations au Covid-19 ont été prouvés, ce qui montre que les anticorps ne sont pas éternels.
Le vaccin permettrait de diminuer les cas de Covid-19 si une large partie de la population est vaccinée. Pour atteindre cette immunité collective, il faudrait qu’au moins 60% de la population ait des anticorps en même temps, soit par une infection naturelle, soit par le vaccin.
41% des Français opposés à la vaccination
“Mais il faut que la population accepte de se faire vacciner, et le sentiment anti-vaccins est aussi un frein dans la lutte contre l’épidémie”, rappelle Yvon Le Flohic. Un sondage publié par Ipsos début septembre estimait que 74 % des adultes dans le monde sont prêts à se faire vacciner contre Covid-19 lorsqu'un vaccin sera disponible. En France, 41% des interrogés sont rétifs face à un potentiel vaccin. Dans le détail, 20 % des Français se disent “fortement opposés” et 21 % “plutôt opposés”.
La France serait un des pays où la population est la moins favorable à une vaccination, alors qu’au Royaume-Uni 85% de la population se dit prête à se faire vacciner, 72% en Espagne et 67% aux Etats-Unis et en Allemagne. Face à cette défiance, plusieurs responsables politiques souhaitent rendre la vaccination contre le Covid-19 obligatoire, comme Yannick Jadot, eurodéputé EELV.
Une étude du CNRS menée en mai révélait que la principale inquiétude chez les opposants à une vaccination contre le Covid-19 était qu’il soit “réalisé trop vite et risque par conséquent d’être peu sûr”. La création d’un vaccin met plusieurs années. Le Devoir rappelle qu’il a fallu cinq ans pour fabriquer celui contre Ebola et 30 ans pour ceux contre la varicelle et la grippe.
Les laboratoires Pfizer et BioNTech ont annoncé avoir développé un vaccin efficace à 90% contre le Covid-19. Une information largement vue comme porteuse d’espoir dans la lutte contre l’épidémie de coronavirus. Pourtant, la mise au point d’un vaccin, celui de Pfizer ou d’un autre, pourrait ne pas suffire à vaincre le Covid-19.
D’autant que ce vaccin de Pfizer, s’il était commercialisé, poserait d’importantes contraintes logistiques. Il est basé sur une technologie totalement nouvelle, celle dite de l'ARN messager, qui impose de le conserver à environ -80 degrés, quand un vaccin classique peut se conserver à -20 degrés.
Un problème de transport et de conservation
Au-delà du transport du vaccin dans ces conditions, son stockage à -80 degrés est un autre problème logistique de taille pour les hôpitaux et pharmacies. Le laboratoire américain aurait déjà pensé à une partie de la solution ; des conteneurs de la taille d’une valise, qui permettrait de transporter 5 000 doses. Mais ces ces boîtes ne pourront être ouvertes que deux fois pour ne pas briser la chaîne du froid et ne pourront conserver les vaccins que dix jours au maximum.
Plus globalement, quel que soit le vaccin qui sera commercialisé, c’est le principe même qui est remis en cause. Premier à mettre en garde, le directeur Europe de l’Organisation Mondiale de la Santé, Hans Kluge. Le 14 septembre, il prévenait : “J'entends tout le temps : ‘le vaccin va être la fin de l'épidémie’. Bien sûr que non ! Nous ne savons même pas si le vaccin va être efficace dans toutes les parties de la population. Certains signes que nous recevons est qu’il sera efficace pour certains, mais pas pour d’autres”.
Des propos qui trouvent un écho de plus en plus large chez les médecins. “Le vaccin, je ne sais pas quand il va arriver, je ne sais pas s’il sera efficace, donc il faut qu’on se dise que le vaccin est l’une des solutions mais qu’on ne sait pas s’il sera la solution”, prévenait sur RTL le professeur Gilbert Deray, chef du service de néphrologie de l'hôpital de la Pitié-Salpétrière à Paris.
“Un vaccin qui n’est peut-être pas parfait”
De son côté, Christian Drosten, célèbre virologue allemand, estime qu’il faut préparer l’opinion à un vaccin “pas parfait”. “Il se peut que les vaccins n’offrent pas une protection suffisante ou qu’il y ait des effets secondaires qui empêchent de les recommander aux jeunes, qui ont tendance à ne pas tomber gravement malades. Je pense qu’il faut commencer à préparer dès maintenant la population à un vaccin qui n’est peut-être pas parfait”, prévenait Christian Drosten dans une interview accordée à Zeit début octobre.
Le vaccin développé par Pfizer est basé sur la technique de l’ARN Messager, qui n’a jusqu’à présent jamais été testée sur l’Homme, et dont les possibles effets secondaires seront donc à surveiller avant d’envisager sa large diffusion, préviennent plusieurs médecins.
Dans La Croix, la professeure Elisabeth Bouvet, qui participe à l'élaboration d'une stratégie de vaccination contre le Covid-19 au sein de la Haute Autorité de santé, tempère également l’enthousiasme de certains. “Le vaccin ne sera pas la solution à tout”, lance-t-elle.
Maintenir les restrictions malgré le vaccin
Si certains de ses confrères émettent des craintes sur l’efficacité du vaccin sur l’ensemble de la population, cette spécialiste des maladies infectieuses et tropicales a une autre inquiétude. “Les premières doses risquant d'être limitées, la France, comme la plupart des pays, compte cibler en priorité les soignants, les personnes âgées et les personnes à risques, comme les diabétiques”, explique-t-elle dans La Croix, alors que la quasi-totalité des pays lorgnent sur le vaccin.
Durant cette période, où seule une partie de la population pourra être vaccinée, il faudra “maintenir les restrictions d’hygiène et de contacts”, appuie Christian Drosten. Autrement dit, le masque, le gel hydroalcoolique et les limitations des contacts sont là pour un moment.
Les États-Unis ont déjà commandé 100 millions de doses, et prévoient d'en acheter jusqu'à 500 millions. L'Union européenne prévoit d'en acheter 200 millions et pourrait en réclamer 300 millions de plus. Les deux laboratoires qui développent ce vaccin prévoient d’en livrer 100 millions de doses d'ici à la fin de l'année et jusqu'à 1.3 milliard en 2021. Si la commercialisation se confirme, le défi logistique s’annonce colossal.
Combien de temps le vaccin sera efficace ?
Mais le fait que toute la population ne soit pas vaccinée aura tout de même un effet positif sur la lutte contre le virus. Si ce dernier ne disparaîtra pas, sa circulation et ses formes graves devraient nettement réduire. Le Covid-19 “fera beaucoup moins de dégâts quand l'action coordonnée de l'immunité acquise par la population après l'infection et celle acquise grâce à la vaccination limiteront sa circulation et son pouvoir pathogène”, conclut Elisabeth Bouvet.
Mais ce ne sont pas les seules interrogations. Le docteur Yvon Le Flohic souligne également l’inconnue qui règne autour de la durée des anticorps. “Sur la question de la durée de l’immunité contre le coronavirus, on ne sait rien. Quelques jours ? Quelques semaines ? Quelques mois ? Cela veut dire qu’un vaccin pourrait n’être efficace que durant une certaine période” nous rappelle le médecin généraliste, ce qui pourrait nécessiter donc une nouvelle vaccination avec une certaine récurrence.
“Il faut que l’immunité dure au moins un an, pour peut être faire des rappels tous les ans comme pour la grippe”, explique sur BFMTV Frédéric Adnet, chef des urgences de l’hôpital Avicennes à Bobigny. Certains cas de recontaminations au Covid-19 ont été prouvés, ce qui montre que les anticorps ne sont pas éternels.
Le vaccin permettrait de diminuer les cas de Covid-19 si une large partie de la population est vaccinée. Pour atteindre cette immunité collective, il faudrait qu’au moins 60% de la population ait des anticorps en même temps, soit par une infection naturelle, soit par le vaccin.
41% des Français opposés à la vaccination
“Mais il faut que la population accepte de se faire vacciner, et le sentiment anti-vaccins est aussi un frein dans la lutte contre l’épidémie”, rappelle Yvon Le Flohic. Un sondage publié par Ipsos début septembre estimait que 74 % des adultes dans le monde sont prêts à se faire vacciner contre Covid-19 lorsqu'un vaccin sera disponible. En France, 41% des interrogés sont rétifs face à un potentiel vaccin. Dans le détail, 20 % des Français se disent “fortement opposés” et 21 % “plutôt opposés”.
La France serait un des pays où la population est la moins favorable à une vaccination, alors qu’au Royaume-Uni 85% de la population se dit prête à se faire vacciner, 72% en Espagne et 67% aux Etats-Unis et en Allemagne. Face à cette défiance, plusieurs responsables politiques souhaitent rendre la vaccination contre le Covid-19 obligatoire, comme Yannick Jadot, eurodéputé EELV.
Une étude du CNRS menée en mai révélait que la principale inquiétude chez les opposants à une vaccination contre le Covid-19 était qu’il soit “réalisé trop vite et risque par conséquent d’être peu sûr”. La création d’un vaccin met plusieurs années. Le Devoir rappelle qu’il a fallu cinq ans pour fabriquer celui contre Ebola et 30 ans pour ceux contre la varicelle et la grippe.
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