Les compétitions internationales comme la Coupe d’Afrique des Nations, sont des moments de communion. Passionnés de football ou supporters occasionnels se mettent aux couleurs nationales. Cette année, comme un clin d’œil nostalgique à la campagne de Séoul et Tokyo, le maillot de 2002 se distingue particulièrement. Dans les vitrines et étals ou encore sur les réseaux sociaux, ce que les vendeurs appellent «maillot rétro ou collector», est mis à l’honneur.
Devant le centre commercial Touba Sandaga, Aliou Diop, la barbe blanche, brandit et secoue un maillot floqué «Mané» pour attirer l’attention des passants. Le sexagénaire, adossé à une voiture, fait observer que les ventes sont timides, mais il garde espoir. «La donne pourrait changer si l’équipe va plus loin dans la compétition.» Il précise par ailleurs, en réajustant le gros sachet sur son épaule, qu’il y a un article qui résistait bien aux méventes. «Le maillot de 2002 marchait très bien, mais on ne le voit presque plus chez les grossistes. Ils le gardent certainement pour faire de meilleures marges après», conclut-il.
C’est une forme de mise en valeur que de placer un produit derrière les vitres. Dans cette boutique située sur une route très fréquentée de Grand-Dakar, on fait mieux : le maillot de l’an 2002 de l’équipe nationale du Sénégal est détaché de toutes les autres marchandises. On l’expose alors dehors, pour montrer qu’il y en a, dans la boutique de Ahmad Faye. Il y a de cela peu qu’est noté un certain engouement populaire à se payer ce maillot «rétro», ainsi que le présente le commerçant. L’enthousiasme incite les vendeurs d’habits qui, en temps normal, ne commercialisent pas de maillots, à se lancer dans leur vente. Ahmed confirme : «Ce sont les maillots les plus demandés en ce moment.» On s’imagine alors qu’il s’en sort bien, en surfant sur la tendance des maillots «old school». Et non. «Je compte arrêter les maillots, une fois écoulé le dernier article en ma possession», dit-il. La raison est toute simple, Ahmed ne s’en sort pas. Non pas parce qu’il n’a pas de marge, mais parce que les victoires de l’équipe nationale du Sénégal font grimper le prix. «Avant le dernier match, j’achetais les maillots rétro à neuf mille francs. Mais, la dernière victoire des Lions fait que mon fournisseur me les cède à dix-mille francs. Ainsi, je serai obligé de les vendre à onze mille francs, pour en tirer bénéfice», enchaîne le vendeur. Alors les exploits de Mané et compagnie actuellement en campagne au Cameroun, en plus de hisser la fierté de tout un Peuple, participent aussi à faire flotter les couleurs de 2002 plus haut dans les cieux de la spéculation. Et tous les commerçants n’ont pas les fonds nécessaires pour suivre ce marathon. La population ou du moins une certaine partie, s’emballe dans la tendance et poursuit le marathon. Djibril Sall est de ceux-là qui n’hésitent pas à enfiler l’uniforme rétro. Jeune homme de plus d’une vingtaine d’années et livreur de profession, il sillonne les Almadies avec cette tenue d’avant qui rappelle une période faste du football sénégalais, communément nommée «l’épopée 2002», durant laquelle les Lions avaient atteint les quarts de finale du Mondial asiatique. C’est avec le sourire qu’il répond à la question de savoir la motivation de l’achat des maillots de la génération de El Hadj Diouf, Henry Camara… Et c’est précisément pour l’une de ces figures de cette période passionnante du football sénégalais. «C’est un hommage à Pape Bouba Diop», prend-t-il le temps de dire, avant d’aller livrer une commande.
Pape Bouba Diop, l’absent le plus présent
Le constat est le même à Colobane. Rares sont les boutiques qui ne proposent pas ce maillot rétro. Son regain de popularité serait cependant antérieur à la présente Can. A en croire Ousmane Tine, spécialisé dans la vente d’équipements de sports, «c’est avec l’hommage à Pape Bouba Diop que le rétro a commencé à entrer sur le marché. Ce sont les tailleurs locaux qui les confectionnaient mais avec l’engouement que cela a suscité, de grands commerçants ont commencé à en importer». La tenue des Lions de 2002 reprend donc des couleurs sur le marché et fait fleurir les affaires des uns et des autres. Le jeune Médoune Diagne a vu passer beaucoup de maillots dans son atelier de flocage, surtout le fameux rétro. Sur ceux-ci, il a eu à imprimer des numéros -le 19 surtout-, des noms, messages et même des prières. Les rétros en question, selon un autre vendeur du nom de Papa Malick Ndiaye, se vendent entre dix et douze mille et peuvent coûter jusqu’à quinze mille francs, «surtout au début» du rush, précise-t-il. Et les fluctuations se font «par rapport aux résultats du Sénégal». Aussi, se font-elles en fonction du marché. M. Ndiaye qui s’approvisionne sur le marché local, confie que ses prix dépendent de ceux de ses fournisseurs. Plus c’est rare, plus c’est cher…
Sur les réseaux sociaux aussi, de jeunes sénégalais montrent leur soutien à cette équipe en partageant des photos et vidéos, où ils arborent fièrement le maillot national. Là également, le «old school» se distingue nettement. Pour Mame Sokhna qui l’a en photo de profil sur twitter depuis le début de la Can, ce maillot symbolise «à la fois la nostalgie et l’espoir que cette fois sera enfin la bonne».
Plus qu’un tissu agrémenté des couleurs nationales, c’est donc de la reconnaissance que l’on achète. Une reconnaissance qui va à l’endroit d’un certain numéro 19 qui avait offert la victoire au Sénégal, face à la France, lors du match d’ouverture de la Coupe du monde 2002 Corée/Japon. A travers le «rétro» autour duquel Pape Bouba Diop et ses compagnons de 2002 ont dansé, c’est aussi un bout de rêve que l’on porte. Un rêve inabouti que la nouvelle génération tente de réaliser au Cameroun.
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