Fonctionnement de la démocratie : Le Premier président de la cour suprême insiste sur le rôle de la presse
Le Premier président de la Cour suprême, Cheikh Ahmed Tidiane Coulibaly, a insisté, lundi à Dakar, sur le rôle important de la presse dans le fonctionnement démocratique, estimant qu’il ne pouvait pas y avoir de démocratie sans la liberté d’expression. «Sans liberté d’expression, il ne peut y avoir de démocratie. Elle est indispensable à la stabilité de la société puisqu’elle participe à la libre circulation des idées et la presse joue un rôle essentiel dans le bon fonctionnement de la démocratie», a-t-il déclaré. Le Premier président de la Cour suprême intervenait à un atelier d’échanges sur la liberté d’expression et la sécurité des journalistes. Une rencontre s’inscrivant dans le prolongement des actions de l’Unesco. L’agence onusienne est notamment chargée d’assurer la mise œuvre d’un plan d’action consacré à la sécurité des journalistes et la question de l’impunité adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies lors de sa séance du 18 septembre 2013. «La liberté d’expression, le droit d’exprimer librement ses opinions, fait partie des libertés fondamentales, piliers de notre démocratie», a rappelé M. Coulibaly, assurant que «sa garantie et son respect», gages de «l’émergence d’une société ouverte, tolérante et respectueuse de l’Etat de droit», étaient largement pris en compte par la législation internationale. Il a ainsi évoqué l’article 11 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, lequel dispose que «la libre communication des pensées et opinions est un des droits les plus précieux de l’homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi», a ajouté le magistrat
Il a également rappelé les dispositions de l’article 19 de la Déclaration universelle des droits humains relevant que «tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre sans considération de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit». Le Premier président de la Cour suprême n’a pas manqué de citer l’article 9 de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples qui prévoit que «toute personne avait le droit d’exprimer et de diffuser ses opinions dans le cadre des lois et règlements». A ces instruments internationaux s’ajoutent, selon lui, «les articles 8 et 10 de notre Constitution, qui garantissent la liberté d’expression, qui est citée au titre des libertés civiles et politiques, et le droit d’exprimer librement ses opinions par la parole, la plume, l’image, la marche pacifique». Ces dispositions juridiques n’empêchent pas les journalistes, dans le cadre de leur travail, «en temps de paix, comme en temps de conflit», de faire parfois l’objet d’intimidation, de meurtres, de tortures, de harcèlements, d’enlèvements, de prises d’otages et d’arrestations arbitraires, sans que les auteurs de ces graves infractions ne fassent l’objet le plus souvent de poursuites pénales appropriées et sanctionnés, a analysé Cheikh Tidiane Coulibaly.
S’appuyant sur des statistiques disponibles, il a déploré le nombre record de 488 professionnels des médias emprisonnés dans le monde, 65 étant otages et 46 autres tués en 2021 et 24 déjà depuis le début de l’année 2022. A l’en croire, «dans 90 % des affaires ayant trait à des assassinats de journalistes, les auteurs de tels sévices bénéficient d’une impunité totale, réduisant ainsi les journalistes au silence». Il en résulte, selon le Premier président de la Cour suprême, «une incapacité des gouvernements et des autorités du monde entier d’empêcher l’assassinat de journalistes et les attaques subies par les médias. Cela a pour conséquence de nous priver d’un droit fondamental qui nous est garanti par la Déclaration universelle des droits de l’Homme, celui d’avoir connaissance d’informations et d’idées et de les communiquer librement à d’autres», a-t-il fait valoir. Pour le magistrat, «chaque journaliste tué ou neutralisé par la terreur est un observateur de la condition humaine en moins. Chaque attaque déforme la réalité en créant un climat de peur et d’autocensure». Il a ainsi souligné la nécessité pour les juges de mettre à profit la portée normative de leurs décisions dans le cadre de la protection de la liberté d’expression.
Protéger la liberté d’expression et l’accès à l’information
«La protection de la liberté d’expression et de l’accès à l’information et la sécurité des journalistes doivent être encouragées et soutenues par les acteurs judiciaires, comme gardiens des libertés», a-t-il de nouveau souligné. «Nous devons être conscients aussi qu’aucune liberté n’est absolue et certaines limites s’imposent à cette liberté d’exprimer librement ses idées», a tenu à rappeler M. Coulibaly, en évoquant les restrictions nécessaires prévues par le droit sous le contrôle du juge telles que «l’incitation à la discrimination ou à la violence qui ne peut être considérée comme l’exercice légitime du droit à la liberté d’expression». En Afrique de l’Ouest, «le Sénégal est le premier pays à bénéficier de l’initiative pour les juges avec l’organisation du présent atelier qui marque le début d’une série à organiser à travers le pays, ainsi qu’une collaboration avec le centre de formation judiciaire pour une meilleure promotion des normes internationales en matière de liberté et de sécurité des journalistes», a pour sa part déclaré le directeur du Bureau régional de l’Unesco pour l’Afrique de l’Ouest-Sahel, Dr Dimitri Sanga.
Aps
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