Livre – Modèle éducatif pour corriger l’inadéquation : Babacar Ndiaye propose Diang diangalé

Dans son nouveau livre «La France à fric», Babacar Ndiaye propose un modèle pour corriger l’inadéquation de notre système éducatif à notre structure démographique.

Par Amadou MBODJI – Le Sénégal, à l’instar des pays africains, se distingue par une population particulièrement jeune. Il est nécessaire de penser un modèle éducatif approprié. Celui que nous proposons s’appelle le modèle Diang diangalé. Ce modèle part du constat selon lequel nos daaras traditionnels (à vocation purement éducative) ont formé des millions de savants dans tout le pays avec de maigres moyens financiers. Comment est-ce possible ? Dans les grands daaras, le Serigne (le maître) peut avoir sous sa responsabilité, des centaines de Ndongo daara (les élèves). La transmission du savoir est hiérarchisée et décentralisée avec un système de solidarité et d’entraide exemplaire. Le Serigne forme les premières générations. Certaines d’entre elles commencent à prendre des responsabilités avec le temps en assistant le Serigne dans l’écriture sur des planchettes de bois appelées alouwa, la préparation du daa (encre noir), etc. Plus tard, ils commencent à encadrer un petit groupe de Ndongo dara plus jeunes en continuant d’apprendre du Serigne. Ainsi de suite, ainsi de suite. Cette technique de management, appliquée dans le passé par la plupart des guides religieux du pays, repose ainsi sur une solidarité intergénérationnelle. Notre système éducatif pourrait s’inspirer de cette technique.
Quelques principes fonctionnels du modèle Diang diangalé : à partir d’un certain niveau scolaire d’équilibre déterminé périodiquement en fonction des besoins (input du modèle), les étudiants peuvent choisir un module que nous pouvons appeler option «Enseignement». Par exemple, un étudiant en 2e année en mathématiques peut encadrer des élèves de 5e pour les exercices, les cours étant assurés par un professeur titulaire. De même, il pourra assister le professeur titulaire sur certaines tâches comme la préparation des cours et des exercices, la correction de certains devoirs, etc. En contrepartie, l’Etat accorde une majoration (à déterminer périodiquement par modèle) de la bourse des étudiants ayant opté pour ce module «Enseignement» ; l’étudiant sera noté sur ce module. Les modalités d’évaluation sur ce module seront scrupuleusement étudiées et impliqueront probablement l’appréciation du professeur titulaire, des élèves, des responsables de l’établissement, etc. Dans l’esprit du modèle, on veillera à ce que l’étudiant ne soit pas perturbé dans ses études supérieures. Pour cela, il faut un équilibre entre ses études (diang) et ses interventions (diangalé). Ainsi, l’étudiant intervient à temps partiel et de façon bien calculée.
Et les avantages et résultats attendus du modèle sont la responsabilisation et motivation des étudiants, lutte drastique contre le chômage ; la facilitation de la mise à jour des programmes grâce à l’assistance des étudiants et à l’allègement de la charge de travail des professeurs expérimentés qui pourront faire plus de choses parallèlement à l’enseignement (recherche, entreprenariat, etc.). «Nous pensons profondément que les enseignements sont parmi les mieux placés pour réussir dans l’entreprenariat au regard de toutes les capacités qu’ils ont développées au fil du temps», note Babacar Ndiaye. Il y a aussi la réduction du gap intergénérationnel entre les professeurs et les élèves grâce à l’implication des étudiants dans la mise à jour des programmes compte tenu de la fraîcheur qu’ils pourraient apporter ; la formation des étudiants au management, à la communication et à toute compétence requise dans l’enseignement est utile dans la vie sociale et professionnelle. Et cela sans dépenser un franc de la part de l’Etat ; la préparation au métier d’enseignant qui, avec ceux de la santé, fait partie des plus nobles mais moins valorisés malheureusement ; les économies considérables au niveau du budget destiné l’enseignement. Ces économies pourront être réaffectées de façon bien calculée. Sans oublier la revalorisation du métier d’enseignant : chaque enseignant, à un certain niveau d’expérience, aura la possibilité d’avoir un étudiant assistant comme les hauts cadres (un enseignant expérimenté/un assistant). Au finish, les grèves seront de mauvais souvenirs et il y aura un allègement de la charge de travail des professeurs expérimentés avec une rémunération correcte. Toutefois, le nombre de recrutement de nouveaux professeurs titulaires diminuera progressivement. L’esprit du modèle étant le bien-être de tous, nous proposons d’affecter une partie des économies réalisées avec ce modèle au financement de la recherche et de l’entreprenariat en privilégiant les professeurs pour combler leurs heures libérées.
D’après une première estimation brute, les économies réalisables grâce à ce modèle pourraient, avec le temps, se chiffrer à plus de 100 milliards F Cfa par an tout en assurant un meilleur résultat. «Un modèle d’estimation de l’impact budgétaire avec des techniques actuarielles, stochastiques, prenant en compte plusieurs scénarios, sera développé dans le cadre de la phase 2 du projet où nous élaborerons, avec les experts sectoriels, un programme politique pour le Sénégal», précise Babacar Ndiaye. Des analyses et propositions sur la langue d’apprentissage et le contenu/programme sont émises dans le livre en complément du chapitre «Système éducatif».
ambodji@lequotidien.sn

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